11« Écrit en 1855 » fait fictivement franchir l’espace de neuf ans qui sépare le « libéral » de 1846 du proscrit politique, « post-scriptum » au message envoyé au Marquis dont la mort probable ne le sépare guère de l’état de mort-vivant où se trouve désormais l’exilé. Il y accède par le biais d’une ascèse faite de solitude absolue, de dénuement, de tension pour « sonder11 » la nature qui l’entoure : Et dépassant la créature,Montant toujours, toujours accru,Il regarde tant la nature,Que la nature a disparu ! Recueil de 158 poèmes rassemblés en 6 livres que Victor Hugo a publié en 1856. Victor Hugo ; Les Contemplations, II, 25, Je respire où tu. La dernière modification de cette page a été faite le 4 août 2018 à 20:48. C’est le trentième poème des Luttes et les rêves, qui dans le déroulement pseudo-biographique du livre est consacré à la découverte du monde des hommes où s’introduit le mal, qu’ignoraient la nature et l’amour dans les deux premiers livres. Calme, avec l’indigenceEt les haillons je vis en bonne intelligence,Et je fais bon ménage avec Dieu mon voisin. Le deuil de l’enfant et celui du monde sont au centre des livres IV et V, tandis que le livre VI pose de façon plus radicale la question de la connaissance. « Ce que dit la bouche d’ombre », long poème discursif qui, avec la caution implicite de la révélation des Tables, propose une eschatologie ésotérique confirmant au plan métaphysique le principe du crime portant en lui, morale et physique confondus, son propre châtiment. Le poème est adressé aux enfants du poète qui partagent son sort, l’épreuve, avec la lutte qu’elle suppose. Les Contemplations réfléchissent l'aspect et traduisent les joies ou les douleurs de « vingt-cinq années », autant dire de toute une existence. 6L’histoire individuelle rejoint alors l’histoire du siècle. Mais, comme le dit Ludmilla Wurst, « les deux recueils n’en restent pas moins complémentaires », au-delà de leur différence évidente. - Contexte historique : Il la peint durant la période de ségrégation raciale aux. » : « Tout est horreur et nuit. De ces hauteurs et de cette ascension, on passe directement au tragique de la misère, éprouvée bien avant l’exil, et au mépris qu’elle engendre parmi la foule (« Peuple océan jetant l’écume populace ! Contexte historique et social. Sa solitude est « désert », « grèves blêmes », ses rêves, ses visions apparaissent « Du bord des sinistres ravines », ses songes de la « brume hagarde » (« À celle qui est voilée », VI, 15). Par eux adviennent la liberté et le progrès. 27 « Veni, vidi, vixi » est écrit à la suite de son éche... 44Les « Mémoires d’une âme » s’inscrivent dans l’histoire bouleversée du XIXe siècle, où l’enfant pensif découvre sa vocation poétique traversée par les événements d’une époque que la création poétique doit prendre en charge. L’accusation est portée avec plus de force encore contre la méconnaissance de l’histoire et du passage d’une époque à une autre, les temps modernes étant liés au libéralisme comme au romantisme : Liberté ! Elle est d’abord un hymne à la paix retrouvée après l’épreuve, « Gethsémani » de l’exilé dont la « solitude » s’achève en « plénitude ». Le second se présente, dans sa Préface, comme  « les Mémoires d’une âme », l’histoire de la vie de l’auteur, considérée du point de vue de sa propre mort symbolique. sois éternelle ! Más informació ; Contexte. « Cadaver » (VI, 13) chante la splendeur du sort qui attend le mort et dont témoigne le sourire du cadavre : « Un commencement d’astre éclot dans sa prunelle ». Demain, dès l’aube, à l’heure où blanchit la campagne…, ou plus simplement Demain, dès l’aube…, est l’un des plus célèbres poèmes de Victor Hugo, publié en 1856 dans le recueil Les Contemplations. Contexte historique immédiat: Après la proclamation officielle du. Pair de France depuis 1843, maire du VIIIe arrondissement de Paris, député à la Constituante en 1848, il soutient Louis-Napoléon Bonaparte avant de devenir son plus farouche opposant, et de s'exiler en Belgique puis en Angleterre jusqu'à la chute du second Empire en 1 Ajoutons que la colère politique du poète accuse le crime du pouvoir et ses répercussions multiples dont la principale est la misère où est enfermé comme définitivement le peuple. Le « temp... 16La disparition de la nature, morte au monde du regard, permet le dévoilement de Dieu, l’accession à la contemplation, à l’espace sacré du temple dessiné par projection du ciel sur la terre12. Entre les deux livres, l’expérience de la mort réelle et symbolique est passée. 42« À celle qui est restée en France » met au premier plan, après la mort de l’enfant, le tragique intolérable du pèlerinage annuel interdit que la proscription impose. Ce n'était pas une lutte pour l'indépendance d'un pouvoir impérial externe, mais une lutte interne au sein d'une des grandes nations d'Europe. Il voit l’astre unique ; il voit Dieu ! L’épreuve du deuil personnel confirme l’idée de cette irruption de la mort dans la vie et dans l’écriture. « Magnitudo parvi » prépare cette identification : 13 Le pronom personnel désigne ici la solitude. 7 « La poésie était le monarchie […] » (« Réponse à un acte d’accusation », I, 7). D’autant plus que la conclusion, pour positive qu’elle soit, n’est pas le pur franchissement de la contradiction. Je n’ai point fait de mal. 34L’ascèse du « Malheureux » qui accuse directement l’impéritie politique n’exclut pas l’accès à la contemplation, lumière cachée sous le voile de la misère, perceptible au poète. Pour le proscrit, relégué, exclu, insulté, il est une voie d’accès à la vérité et à la paix. 4 Voir sur ce point les travaux fondateurs de René Journ... 4La composition du recueil suppose un vaste travail de réflexion dont témoigne en particulier le jeu savant des dates attribuées à la rédaction des poèmes. 01:49 « Les Contemplations » de Victor Hugo Demain, dès l’aube, à l’heure où blanchit la campagne. Il s’agit des « Malheureux » (V, 26), écrit en septembre 1855, placé consciemment à la fin du livre V, En Marche, où c’est plus directement le malheur familial et social propre à l’exil qui est en cause. Le poème en reprend l’esprit et la philosophie du crime portant en lui son châtiment : Et Dieu les a tous pris alors l’un après l’autre,Le puissant, le repu, l’assouvi qui se vautre,Le czar dans son Kremlin, l’iman au bord du Nil, […]M’ouvrant avec ses mains ces profondes poitrines,Et, fouillant de son doigt de rayons pénétré,Leurs entrailles, leur foie et leurs reins, m’a montréDes hydres qui rongeaient le dedans de ces âmes. Le premier livre devient donc le livre du passé, de la jeunesse, de la découverte de la nature, de l’amour et de la société, le second celui de la mort réelle et symbolique, recentrée in fine sur le temps de l’exil, celui de la composition définitive du recueil. » se substitue : « Après ? "Théâtre et société"). J’ai rêvé près des flots, dans les herbes, […]Oui, dans le même temps où vous faussiez ma lyre,Marquis, je m’échappais et j’apprenais à lireDans cet hiéroglyphe énorme : l’univers. Dans « Le Mendiant » (V, 9), le poète accueille le pauvre qui place devant la cheminée le haillon qui lui sert de vêtement. Face aux responsables de la proscription et de l’opprobre, « Les Mages » disent le triomphe des grands contemplateurs et l’avènement de leur œuvre de progrès. Classiques de Poche, éd.Livre de Poche Octobre 1853. Le baroque et le symbolisme sont des courants littéraires. 8« Écrit en 1846 » est composé à dessein sur le même modèle d’une réponse à un accusateur. Le premier volume prendra finalement la forme des Contemplations, en 18562. prendre en charge La plupart de ces poèmes ont été écrits entre 1846 et 1855 . Les Contemplations reflètent aussi les préoccupations politiques de Hugo homme d'action. Lorsque l’ascèse dépasse l’espace moral, matériel, social pour se résoudre en vide métaphysique, la contemplation est mise en échec. 25L’acceptation de la solitude, de la pauvreté sociale et morale, de l’exil est le passage nécessaire pour atteindre à la contemplation qui est aussi la voie du bonheur. Victor Hugo, 1853. Ce passage de l’ignorance au savoir suppose, dans la cinquième partie, que l’œuvre littéraire accomplie l’est au service « de la cause humaine » : drame, prose, vers où le poète plaide « pour les petits et pour les misérables ». Peu d'oeuvres poétiques se réfèrent plus ouvertement à leur contexte historique et biographique que celle-ci. Parmi les poèmes qui chantent cette marche à travers champs et forêts, fleurs et oiseaux, quelques-uns rappellent que sa vocation poétique est indissociable de cette découverte (I, 9 ; 13 ; 17, par exemple). 18Ce passage par l’ascèse de l’absence au monde, indispensable à l’accession à la contemplation, va trouver sa correspondance tragique dans l’épreuve de la mort de l’autre, l’enfant, et de la mort sociale représentée par l’exil. Voyez les conditions d’utilisation pour plus de détails. La publication inverse cet ordre. Le poème est composé en 6 parties et suivi de « Écrit en 1855 » qui va introduire de façon explicite la double histoire poétique d’une part, politique et sociale d’autre part, de l’exil. Quatre ans après la publication des Contemplations, Hugo va reprendre la rédaction des Misérables20. Les dates réelles de la composition des poèmes permettent de constater certains artifices volontaires, comme autant de trouées, de « brèches » dans le fil de la lecture. Il annonce le lien entre la « Grandeur du petit » et « Les Mages », poème situé à la fin du recueil avant la révélation de la « Bouche d’ombre ». bois profonds ! Histoire littéraire. Connu dabord comme le chef de fil des romantiques, il reste fidèle à ses idéaux royalistes jusquau milieu de la Restauration. Dans « Les Mages », au contraire, le mot est le dernier du poème, et semble correspondre à l’accomplissement de la contemplation, précédant l’énigme de « L’extase de la mort sacrée » : En attendant l’heure dorée,L’extase de la mort sacrée,Loin de nous, troupeaux soucieux,Loin des lois que nous établîmes,Allez goûter, vivants sublimes,L’évanouissement des cieux ! –. La plupart d’entre elles sont fictives, pour créer l’illusion d’une suite chronologique. C’est l’ascèse de leur très laborieuse démarche concrète, intellectuelle et spirituelle, qui les fait extraire, comme l’a bien montré Jacques Seebacher17, le Dieu de la création : Ils tirent de la créatureDieu par l’esprit et le scalpel ;Le grand caché de la natureVient hors de l’antre à leur appel ;À leur voix, l’ombre symboliqueParle, le mystère s’explique, […]18. 25 Les deux poèmes sont écrits successivement, « Dolor » le 30 mars 1854, « Horror » la nuit du 31. Le renouvellement de l’écriture classique, qui rend compte parfaitement des trois premiers livres, a franchi un degré. Le titre du livre VI, Au bord de l’infini, reprend sous toutes leurs formes les révoltes originelles pour aboutir in extremis, dans « À celle qui est restée en France », à l’opposition fondamentale qui implicitement portera toute la suite de l’œuvre. Mais, avec le temps, la peur vient, sans qu’il prenne bien la mesure de cette Révolution « formidable ». L’épreuve de la misère et de l’injustice sociales sous toutes leurs formes, dont la politique de l’époque est responsable, sont autant de sujets d’opposition aux temps paisibles de la découverte d’une poésie nouvelle que comble la découverte de la nature et de l’amour. 2Le premier affiche sa dimension pamphlétaire ayant pour objet, Napoléon III, « le drôle en chef » et ses sbires du second Empire. Le fait était déjà évoqué dans « Joyeuse vie » (Châtiments, III, 9) par le spectacle des caves de Lille et de la misère sordide qui y régnait. La misère sociale « historique », relais de la misère morale et philosophique de l’exilé. « Qu'est-ce que les Contemplations ? – Je suis content ». 10À la découverte de la nature « Prodigieux poème » et de l’homme « autre alphabet » où le mal apparaît, a succédé la lecture de l’histoire et l’intelligence des Révolutions « monstrueuses marées, / Océans faits des pleurs de tout le genre humain ». Hélas ! 21 « Écrit sur un exemplaire de la Divina Commedia », II... 29Ici encore, le souci d’une chronologie interne au recueil, que traduit la datation fictive, est particulièrement sensible dans le grand poème « Melancholia », écrit encore sur ce modèle discursif que Hugo réserve à l’énoncé de vérités essentielles, selon un mode historique, narratif ou descriptif qui se plie à la composition poétique. Contexte historique Contexte culturel Romantisme Ire République (1792-1804) Premier Empire (1804-1814) Restauration (1814-1830) RÉVOLUTION FRANÇAISE (1789-1799) 1837 ... 9782210764729_Contemplations_010_252.indd 10 18/07/2019 08:03. La dernière partie orchestre l’idée d’une indéfectible fidélité à soi-même : L’horizon a changé, marquis, mais non pas l’âme.Rien au-dedans de moi, mais tout autour de moi.L’histoire m’apparut […]. et, sans ton sourire, que ferai-je du matin ? Une révolution esthétique devait faire suite à la Révolution politique, relevant du même progrès. de Charles Hugo. 14:10 « Les Contemplations » de Victor Hugo A Villequier. 20 On peut y voir des allusions directes dans « Melancho... 27En revanche, le poète trouve des porte-parole intérieurs dont l’exil n’est pas d’être éloigné physiquement de France, mais de vivre à l’intérieur de leur patrie. 17La connaissance acquise du mystère permet de retrouver, au sortir du « rêve », la nature et les hommes dans la plénitude de leur sens physique et moral. Profil d'une oeuvre, Hatier n° 76, "Les Contemplations" de Victor Hugo, de Pol Gaillard et Arnaud Laster, 4,50 €, des clés indispensables pour lire l'oeuvre (Le contexte historique, la structure du recueil, et l'étude des problématiques essentielles (Libération du vers et du mot, le désir et l'amour, l'épreuve du deuil, la dénonciation des injustices). Textes et contexte pour l'étude des Contemplations de Victor Hugo. Image dernière de l’exilé dont la pensivité active qui prélude à la contemplation, fait la force douloureuse, mais triomphante26. « Dolor » (VI, 17), placé à la suite d’« Horror »25, transforme la douleur en expiation et exalte « les grands sacrifiés rêveurs ». Ancienne élève de l'Ecole Normale Supérieure de Lyon, agrégée de Lettres modernes, elle a publié Le Cabaret de l'Ecluse (1951-1974).Expérience et poétiue des variétés (PUL, coll. En revanche, le pâtre, dont le feu est aperçu au loin, parvient, lui, à franchir la limite de ce qu’atteint « notre âme humble et lasse ». États - Unis. 12 Le mot est pris dans son sens étymologique. Les Châtiments de Victor Hugo ont été publiés pour la première fois en 1853, soit deux ans après le coup d'Etat de Louis Napoléon Bonaparte. Cette seconde partie composera Châtiments publié en 1853. Après la révolution de 1848, Victor Hugo devient député de Paris et s’engage contre la peine de mort et les injustices sociales. »). Il partage alors le sort de ceux qu’il était censé défendre et succombe sous les huées, les injures et l’envie qui l’arrachent à la vie pour mieux le reconnaître une fois mort. Ainsi dans « Horror » (VI, 16) : Oui, le penseur en vain, dans ses essors funèbres,Heurte son âme d’ombre au plafond des ténèbres ;Il tombe, il meurt ; son temps est court ;Et nous n’entendons rien dans la nuit qu’il nous lègue,Que ce que dit tout bas la création bègueÀ l’oreille du tombeau sourd. Pauca Meae est le Livre IV de l'ouvrage Les Contemplations écrit par Victor Hugo en 1856 composé de 158 poèmes en 6 livres. Il inclut, cependant, une réflexion sur le rapport entre cette « destinée » et l’évolution politique et poétique de l’énonciateur, poétique où le « moi » de Châtiments est fortement interrogé. Contemplationsqui consiste à rabattre la république sur Léopoldine, la catastrophe historique sur le deuil intime n’est pas sans danger, et même, ainsi grossièrement formulée, ne nous semble pas pertinente, au moins sociocritiquement ; son lukacsisme attardé suffit d’ailleurs à la disqualifier en réactivant la défunte, et détestable, théorie du reflet. Les deux livres suivants sont à l’évidence ceux du deuil plus large que représente l’exil : deuil politique et social, expérience d’une mort au monde des vivants et à l’action directe parmi ceux-ci, expérience finale du doute, de l’interrogation métaphysique, et l’évolution d’une poétique que cela suppose. Le poème des « Mages » est situé à la fin d’Au bord de l’infini, livre de l’exil encore, mais placé sous le signe de l’interrogation métaphysique qui sous-tend la vie tourmentée du proscrit. La Révolution française de 1789 a créé un torrent d'idéaux romantiques dans toute l'Europe. A propos du livre Mais la censure quexerce Charles X sur la presse comme sur les œuvres littéraires le fait évoluer vers le … Son abattement politique n’est pas encore oppositionnel. 7 « La poésie était le monarchie […] » (« Réponse à un a... 12Ces poèmes du livre V, dans la ligne de ceux du livre I, où se mêlent comme originellement poétique, histoire et politique, inscrivent un changement notoire. Mais il va rapidement prendre un caractère universel. 22 Poème reporté dans la première Légende des Siècles, en 1859. Le poète se définit alors comme un passant méditant sur « le fond de la souffrance humaine ». Mais si Châtiments a bien pour objet essentiel l’histoire contemporaine, satire patronnée par la « Muse Indignation » de Juvénal, le recueil inclut une double réflexion sur la force du Verbe et le caractère performatif des coups qu’il porte ainsi que sur l’histoire de l’auteur et son évolution historique qui est le sujet de plusieurs poèmes. Objectif : situer l'oeuvre dans son contexte ainsi que dans l'ensemble de l'oeuvre de l'auteur et en connaître les principales caractéristiques. tout est sépulcre. 26 Retrait qui s’oppose à l’accomplissement : le dévoile... 43Cette ultime mort au monde qui passe par l’« évanouissement » de l’œuvre semble mettre un terme au long renoncement imposé par l’exil, à la fois acceptation, sacrifice du « moi » terrestre, et accès glorieux de l’âme à la confusion avec la nature. Le recueil est également divisé en deux grandes parties : Autrefois et Aujourd'hui. À la question « Pourquoi ? Bientôt l’histoire du siècle se précipite, révolution de 1848, mais surtout pour Hugo triomphe du « drôle en chef », passage à l’opposition politique, révolte et exil27. 5Ces longs poèmes, qui se répondent de part et d’autre de l’ouvrage, relatent la biographie poétique et politique du poète, depuis son enfance au livre I jusqu’à l’exil au livre V. Le livre I est consacré à la découverte de la nature que fait le jeune poète au sortir du collège. […]J’étais même avant toi ; tu n’aurais pu, lumière, Sortir sans moi du gouffre où tout rampe enchaîné ;Mon nom est FIAT LUX, et je suis ton aîné5 ! Jean Massin , Le Club français du livre, t. 9, 1968). 41Le livre VI, en dépit de l’alternance soigneusement entretenue entre les pièces et du choix de terminer sur le grand poème didactique de l’échelle dynamique des êtres, reste dans le recueil celui de l’épreuve du doute. Le drame de la proscription ne se révèle qu’à travers le vaste mouvement de l’histoire et à travers l’affirmation d’une poétique, en étroite corrélation avec la mort morale, affective, sociale et finalement métaphysique. La question de la stérilité de la pensée humaine, sa vanité, son absence d’avenir sont sûrement la sanction morale et métaphysique la plus cruelle qu’inclut la proscription. Le contexte historique du XVIème siècle : De la brigade à la pléiade. Certes Les Châtiments (1853), violent libelle contre Napoléon III, marquaient un retour à la poésie, mais à une poésie tout entière au service de la politique. Auparavant, le doute annoncé dès la deuxième strophe (« Mon esprit, qui du doute a senti la piqûre ») sur ce qui attend l’homme condamné à mourir est partout. Article « Les Contemplations », la structure de l’œuvre. 19« Le Poète » (III, 28), texte daté de 1835 et écrit en 1854, est dédié à Shakespeare, contemplateur au « génie étrange » qui perce le secret des êtres et dont la vision accède à la totalité : « le monde tout entier passe à travers son crible ». Publiées en 1856, Les Contemplations portent la marque d'un double deuil : la pert Court, mais grand poème de l’exil dans son acceptation : solitude du « naufragé », paysage de l’abîme, mer et cieux, nuages noirs, ouragans, opprobre de la société, l’insulte ou les messages apeurés d’anciens amis, l’horizon : mort et infini. Il est remarquable qu’aucune accusation directe de la condamnation de 1851 et de ses responsables ne soit évoquée et que l’exil politique apparaisse comme un fait acquis. Sur l’observation première se greffe l’idée d’une vérité plus haute, celle de correspondances indiquant elles-mêmes une unité dont le plan se confond avec l’infini, Dieu, accessible par l’ascèse de la solitude et du labeur, première mort au monde, encore symbolique, ouvrant à la contemplation. 33Il y a entre les livres III et V des correspondances évidentes dont ce dernier poème, entre autres, témoigne : dans les deux cas, la société des hommes est au centre du livre. 11 « Sondant l’être, la loi fatale, / L’amour, la mort, la fleur, le fruit […] » (« Magnitudo parvi », III). 7« Quelques mots à un autre », en I, 26, daté fictivement de novembre 1834, sert de relais à cette « Réponse » et annonce « Écrit en 1846 » qui, placé au livre V, fut écrit à sa suite et antidaté pour les mêmes raisons de composition biographique. 21Cette ascèse est celle de la contemplation, paroxystique : l’écoute de la nature, la perte de soi dans le regard-rayon qui relie l’âme à celui qui émane de Jéhovah, rattachant ainsi Dieu aux hommes, l’engloutissement enfin dans la vie universelle. 10 À Hetzel, le 12 juillet 1855 : « Je recommande à votre attention fraternelle et paternelle d’abord tout, puis très particulièrement la grosse pièce qui finit (Magnitudo parvi) et qui marque le passage d’un volume à l’autre, du bleu clair au bleu sombre. » Cité par Léon Cellier, Les Contemplations, Paris, Classiques Garnier, 1985. Il est évidemment artificiel de séparer ces trois axes concomitants, familial, politique, poétique, mais la lecture suffit à les regrouper et l’analyse permet de saisir ce jeu des correspondances entre poèmes d’un bout à l’autre du volume, ce qui rend sensible l’unité de l’ensemble. Mais les poèmes les plus anciens de ce recueil datent de 1834. Ils marquent don Placés sous le signe du refus du désespoir, ils prennent en charge en quelque sorte l’épreuve comme « Éclaircie » (VI, 10). L’exil est lié directement à l’histoire et à un choix politique qui atteint le poète dans sa vie et son rapport au monde. importante dans la seconde partie que dans la première ; les poèmes, septembre 1843, séparant le 2. Le lexique était soit noblesse, soit « populace du style », affaiblissant l’idée à exprimer. Dans le livre des Contemplations, Victor Hugo tient ses yeux et son esprit attachés sur lui-même. Il n’est plus que l’ascèse d’une pensée acharnée non pas à vaincre mais à mesurer « le problème aux murailles d’airain », à chercher, à suivre de l’œil, à regarder « Le gouffre monstrueux plein d’énormes fumées ». 8 Jean Gaudon donne les étapes de la composition d’après... 9 Voir l’ouvrage de Jean Gaudon, Le Temps de la Contempl... 10 À Hetzel, le 12 juillet 1855 : « Je recommande à votr... 13Le travail de la composition, de la disposition des poèmes dans le volume est essentiel. 3 La Préface précise, on le sait, la fusion entre auteur... 3Deux poèmes de Châtiments évoquent l’histoire politique du poète : « Ce que le poète se disait en 1848 » et « Écrit le 17 juillet 1851, en descendant de la tribune », revirement qui suppose le passage d’une poétique du retrait à celle d’une parole de vérité. conclusif "A celle qui est restée en France", Un très léger déséquilibre se », échappe au crime qui régit la société. Photographie Du fond de cette solitude tragique qu’impose la proscription, l’opposition prend alors tout son sens. L’ultime méfait de l’histoire : l’exil politique, proscription du domaine de la connaissance . contre 70 dans la seconde) compensé par la masse des vers plus ... paru en 1856 dans le recueil Les Contemplations - contexte historique : Durant les successions de régimes politiques, la révolution industrielles et les bouleversement sociaux. Les Contemplations comme œuvre du deuil Les Contemplations sont surtout un recueil de la nostalgie et en particulier du souvenir de Léopoldine , la fille du poète, qui meurt noyée dans la Seine avec son mari le 4 septembre 1843 , dont Hugo apprend la mort par hasard dans la presse le 9 septembre 1843 à Rochefort, alors qu'il revient d'un voyage en Espagne avec Juliette Drouet. "l'existence humaine sortant de Dans « Autrefois », la connaissance du monde provoquait un renoncement à la « poésie-monarchie7 » et une adaptation poétique et historique aux temps présents, à la reconnaissance d’une révolution dans les deux domaines : la politique et le langage. 31D’autres poèmes de la misère, comme en III, 11, « ? Leur répondent dans Les Contemplations, « Réponse à un acte d’accusation / Suite », « Veni, vidi, vixi », « Écrit en 1846 / Écrit en 1855 ». » dans les deux parties suivantes superpose la montée de l’histoire et celle de l’âge d’homme : un même paradigme réunit « J’ai grandi », « J’ai vécu ; J’ai pensé » : J’ai pensé. Le poème  « Ô strophe du poète, autrefois, dans les fleurs » (V, 25,) décrit cet arrachement forcé que l’exilé a fait subir à une poésie autrefois en symbiose avec sa propre découverte de la nature, de l’amour, des hommes, pour que désormais le poète la contraigne, « Proserpine sinistre », à partager la prison du « sévère habitant de la blême caverne ». Dans la première partie de « Magnitudo parvi », où sont mis en scène le père et sa fille, la question de la connaissance est posée et le poète ne peut que constater les limites de son regard : L’inconnu, celui dont maint sageDans la brume obscure a douté,L’immobile et muet visage,Le voilé de l’éternité,A, pour montrer son ombre au crime,Sa flamme au juste magnanime,Jeté pêle-mêle à l’abîmeTous ses masques, noirs ou vermeils ;Dans les éthers inaccessibles,Ils flottent, cachés ou visibles ;Et ce sont ces masques terriblesQue nous appelons les soleils ! Comme si les accusations directes et nominales s’étaient plutôt déversées dans Châtiments. 17 Jacques Seebacher, « Sens et structure des Mages », d... 20Les Mages, savants, poètes, penseurs, philosophes, ermites célèbres retirés dans la nature, apôtres, prophètes, souvent soumis eux-mêmes à la solitude, au malheur et à la persécution, « contemplateurs pâles/ Penchés sur l’éternel effroi14 », apparaissent à « la foule égarée15 », condamnée à l’ignorance, à l’angoisse et à la mort, et lui révèle Dieu. Le recueil des Contemplations se présente d’abord comme très éloigné du pamphlet satirique, tant du point de vue de l’énoncé, « une destinée est écrite là jour à jour », que de l’énonciation effaçant largement la part « personnelle » de la voix poétique, « ma vie est la vôtre, votre vie est la mienne ». Depuis Les Rayons et les Ombres (1840), Victor Hugo (1802-1885) n'avait pas publié de recueil lyrique. L’ère advenue de l’idée, née de la Révolution politique, force à prendre parti dans le monde des lettres et réfute une poétique et une éthique socio-politique appartenant à des temps dépassés. 25 Les deux poèmes sont écrits successivement, « Dolor »... 39D’autres poèmes, enfin, ouvrent à un retournement radical. 27 « Veni, vidi, vixi » est écrit à la suite de son échec à la députation comme candidat de droite. Le livre est donné comme partagé en deux partie : Autrefois, 1830-1843, Aujourd’hui, 1843-1856. Inversement les véritables « malheureux » sont les jouisseurs et les triomphateurs. Cette révolution dans la langue et le style permet alors d’énoncer le bien-fondé d’une poétique neuve, rejoignant l’ordre de la Création : Quand, aux jours où la terre entr’ouvrait sa corolle,Le premier homme dit la première parole, Le mot né de sa lèvre, et que tout entendit,Rencontra dans les cieux la lumière, et lui dit :« Ma sœur !Envole- toi ! cit., p. 196). *Il le regarde, il le contemple ;Vision que rien n’interrompt !Il devient tombe, il devient temple ;Le mystère flambe à son front. 17 Jacques Seebacher, « Sens et structure des Mages », dans Victor Hugo ou le calcul des profondeurs, Paris, PUF, coll.